Essai Ford Ranger Raptor : Le joujou extra
Prenez un pick-up Ranger, confiez-le à Ford Performance, puis profitez de la vie au volant d’un engin transfiguré dans sa forme comme dans les sensations qu’il procure au volant.
Marre du politiquement correct automobile, envie de liberté et de grands espaces ? A défaut de posséder une ferme dans un village reculé de l’Aveyron, vous avez déjà l’outil idéal pour vous y rendre, que ce soit par la route ou à travers champ. D’accord, au niveau discrétion, c’est raté : le Ford Ranger Raptor fait 5,36 m de long, est encore plus haut de 5,2 cm (1,87m) et plus large de 16,8 cm (2,18 m avec rétroviseurs) que le Ranger classique… Justement, quitte à acheter un pick-up, pourquoi ne pas pousser le concept un peu plus loin et profiter d’une préparation esthétique comme mécanique de bon niveau ?
« Oubliez tout ce que vous pensez savoir sur les pick-up », indique Leo Roeks, Directeur de Ford Performance en Europe. « Le nouveau Ranger Raptor est dans une catégorie à part. C’est un pur-sang capable de faire la course dans le désert, d’affronter n’importe quel terrain de jeu, et qui peut tout transporter, même dans les conditions de travail les plus extrêmes. » Il a oublié de dire que sur la route, aussi, les modifications mécaniques apportées transfigurent son comportement, et de manière extrêmement positive.
D’abord, les modifications sous le capot : jusqu’alors, le plus puissant des moteurs proposés (64 % des ventes en 2018) était le 3.2 l diesel de 200 ch. Le Ford Ranger Raptor n’embarque certes qu’un quatre-cylindres de deux litres, là aussi diesel, mais suralimenté par un double turbo qui lui permet de délivrer 213 ch et 500 Nm de couple à un régime assez bas (entre 1 750 et 2 000 Trs/mn).
Ajoutez à cela une boîte de vitesses automatique à 10 rapports (celle du F-150 Raptor vendu aux Etats-Unis) et vous vous retrouvez au volant d’un engin qui ne fait pas de miracles en accélération pure ou en vitesse de pointe (10,5 s pour passer de 0 à 100 km/h et 170 km/h maxi), mais qui dispose de suffisamment de couple pour donner des sensations et s’extraire des situations les plus délicates. En outre, il convient de souligner que le comportement routier est extrêmement bon, malgré les pneus au profil tout-terrain qui ont été spécialement conçus pour ce Ford Ranger Raptor.
On sait bien que le pneumatique est toujours une question de compromis, et alors que la sculpture des BF Goodrich (dimension 285/70 R17) promet une excellente capacité d’évacuation d’eau ou de sable –tous les tests menés au Maroc lors de la présentation l’ont démontré– on s’attendait à ce que le comportement routier soit « difficile ». Il n’en est rien, et nous avons franchement été surpris par leur confort de roulage et leur grip, peut-être aussi grâce à leur dimension spécifique (838 mm de diamètre et 285 mm de largeur).
Bien sûr, il n’y a pas de miracle sur les transferts de masse trop importants, et les lois de la physique se rappellent au conducteur un peu trop optimiste. Mais ce qu’offre ce Ford Raptor en termes de tenue de route est largement supérieur à ce que proposent les autres picks-up équipés de pneus au profil routier. Pour trouver une explication rationnelle à cette situation, il convient alors de se pencher sous le véhicule pour découvrir un dessin de suspension et de trains roulants inédit.
Châssis optimisé
Les suspensions du Ford Ranger Raptor reposent sur des amortisseurs Fox Racing Shox dont la course est allongée de 32% à l’avant, et 18% à l’arrière par rapport à un Ford Ranger classique. Ford Performance y a ajouté la technologie « Position Sensitive Damping » : c’est une valve contrôlée électroniquement qui ajuste en permanence la pression des gaz à l’intérieur des tubes. Les suspensions génèrent ainsi des forces d’amortissement plus élevées en tout-terrain, et plus faibles sur la route.
En revanche, elles font preuve d’une adaptation immédiate en cas d’imprévu ou d’aspérité abordée un peu vite. En clair, vous pouvez attaquer n’importe quel ralentisseur sans lever le pied et vous ne sentirez rien ou presque. Cela en devient même amusant de ne pas couper les gaz à l’approche d’un gendarme couché, et de voir la sportive qui vous colle au train (par excès de curiosité), être obligée de sauter sur les freins pour ne pas laisser son bouclier sur le bas-côté…
A l’arrière, l’architecture du châssis se compose de quatre tirants longitudinaux pour former un parallélogramme de Watt, ce qui assure un meilleur guidage de l’essieu en absorbant les mouvements horizontaux et en limitant les perturbations latérales, toutes proportions de poids (2,5 tonnes, quand même) et de taille gardées. A noter que depuis le volant le Raptor semble léger grâce à une direction bien calibrée, mais aussi qu’il braque très bien, rendant les demi-tours plutôt aisés.
En tout-chemin voire tout-terrain, le sourire du conducteur est encore plus large. Cette sensation de se sentir invincible, qu’on va pouvoir tout affronter en toute sérénité est extrêmement agréable d’autant que l’engin suscite plutôt la sympathie des passants. Sa transmission à 10 vitesses propose plusieurs modes (Normal, Sport, Neige/Graviers/Herbe, Sable/Boue, Rocher, et Baja, pour la conduite rapide sur piste, comme dans les grands raids qui courent du sud de la Californie au Mexique). En tout cas, le Ford Ranger Raptor semble ne pas avoir de limite tellement il est facile à conduire : il faut dire qu’avec une garde au sol de 28,3 cm (+5,1 cm par rapport à un Ranger classique), un angle d’attaque de 32,5° (+3,1%), ventral de 24° (+2%) et de fuite de 24° (+3%), il n’a pas grand-chose à craindre…
En mode Sport ou Baja, utiliser les palettes en magnésium sur les côtés du volant ne sert qu’à s’amuser, car le pick-up fait plutôt bien le job tout seul, même si la gestion électronique de la boîte n’est pas toujours parfaite. On aurait aimé avoir un peu plus de puissance dans certaines conditions, mais le couple compense bien cette carence. Quant au freinage, il est bien calibré pour l’exercice, grâce à des disques avant ventilés de 332 mm à l’avant comme à l’arrière (seule l’épaisseur change), lesquels sont mordus par des étriers à double pistons.
Bref, en termes de conduite on n’est pas loin du sans-faute pour ce genre d’engin, très au-dessus de ce que font les autres en termes de sportivité. On peut alors dire que le Raptor a créé lui-même une catégorie « pick-up plaisir », dimensionné avec raison pour l’Europe en termes de motorisation, sur la base d’un véhicule d’abord destiné à une utilisation utilitaire.
Un intérieur spécifique, mais…
Les chiens ne font pas des chats : le Ranger est un utilitaire, le Ford Ranger Raptor est un dérivé sportif qui ne peut pousser trop loin le curseur de l’amélioration du traitement de la planche de bord et de l’habitacle. Les matériaux sont corrects mais le style, très classique, ne peut que demeurer. En revanche, les sièges sont spécifiques et plutôt agréables à habiter.
La double cabine est assez bien agencée et « berlinisée » à l’arrière, avec un dossier de banquette qui n’est pas droit, comme dans beaucoup de pick-ups, pour épouser la forme du fond de la benne et optimiser le chargement. Embarquant des technologies modernes en termes d’aides à la conduite, ici adaptées aux proportions et aux capacités de l’engin (contrôle de stabilité avec atténuation du roulis, contrôle de stabilité de la remorque, aide au démarrage en côte, contrôle en descente et système de contrôle adapté au chargement), le Ford Ranger Raptor reçoit aussi un dispositif multimédia SYNC 3 accessible avec écran tactile de 8 pouces. Compatible Apple CarPlay et Android Auto, il est équipé pour la première fois du FordPass Connect avec modem 4G embarqué pour constituer un hotspot Wifi.
Pour finir, quelques mots sur les aspects pratiques et autres données : Homologué à 8,9 l/100 km, le Raptor consomme forcément un peu plus. Ce qui n’est rien compte tenu du poids, des dimensions et des performances développées avec son moteur diesel moderne à double turbo. Par ailleurs, il offre une bonne autonomie grâce à son réservoir de 80 litres.
En revanche, ses émissions de CO2 sont établies à 233 g/km, ce qui veut dire que le malus de 10 500 € n’est pas évitable en version « Véhicule particulier » et double cabine. Mais des solutions existent, parlez-en à votre concessionnaire. Enfin, il est important de noter que le Raptor n’a pas le même PTAC que le Ranger classique, compte tenu de la technologie de ses trains roulants. Il peut embarquer moins de poids : 620 kg maxi à l’arrière, contre 970 kg pour le Ranger classique. Ce qui laisse quand même un peu de marge pour embarquer son quad ou son Jet-ski.
Bilan
Au même titre qu’une Lotus Elise ou toute autre voiture totalement décalée, dépouillée ou inconvenable sur le plan politique, le Ford Ranger Raptor donne la banane. Une sensation assez difficile à envisager avant d’en prendre le volant, mais il y a bien un réel plaisir de conduite et un capital sympathie important à l’encontre de cette grosse machine, qui ne fait pas dans le détail mais qui le fait bien. Si vous avez la place, les moyens et les idées larges en termes d’automobile, c’est le pick-up et la version qu’il vous faut. Et rien d’autre.
Ses points forts
– Sa puissance et son châssis remanié
– Les modes de conduite disponibles
– Référence du segment
Ses points faibles
– Le style classique de l’habitacle
– La boîte pourrait être améliorée
Lire aussi : WRC – Rallye de Turquie : Doublé de Citroën !
Photos : DR