De quel droit : la confiscation du véhicule

Parmi les pouvoirs du juge, il y a celui de confisquer. C’est un pouvoir général qui lui est reconnu par l’article 131-21 du Code pénal. L’alinéa 2 de cet article dispose : « La confiscation porte sur tous les biens meubles ou immeubles, quelle qu’en soit la nature, divis ou indivis, ayant servi à commettre l’infraction ou qui étaient destinés à la commettre, et dont le condamné est propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition ».

Parmi ces biens meubles, figurent en bonne place les véhicules…

La confiscation de la voiture ou de la moto…

Il s’agit là d’une peine complémentaire qui peut frapper l’automobiliste s’il est condamné. Mais il est possible qu’au moment de la verbalisation, le véhicule intercepté soit également confisqué alors même qu’aucun procès n’a eu lieu et qu’aucun jugement définitif n’est intervenu ! Le véhicule est alors immobilisé puis mis en fourrière avant d’être définitivement confisqué par le juge.

A quelles règles obéissent ces mesures drastiques ? Que se passe-t-il si le juge ne prononce finalement pas la peine de confiscation ? Qui paye alors les frais de fourrière ?

Confiscation provisoire ou définitive ?

C’est l’article L.325-1-1 du Code de la route qui régit la matière :

« En cas de constatation d’un délit ou d’une contravention de la cinquième classe prévu par le présent code ou le code pénal pour lequel la peine de confiscation du véhicule est encourue, l’officier ou l’agent de police judiciaire peut, avec l’autorisation préalable du procureur de la République donnée par tout moyen, faire procéder à l’immobilisation et à la mise en fourrière du véhicule. »

Plusieurs cas :

Si la juridiction ne prononce pas la peine de confiscation du véhicule :

celui-ci est restitué à son propriétaire

Si la confiscation est ordonnée :

le véhicule est remis au service des domaines en vue de sa destruction ou de son aliénation. Les frais d’enlèvement et de garde en fourrière sont à la charge de l’acquéreur. Le produit de la vente est tenu, le cas échéant, à la disposition du créancier gagiste pouvant justifier de ses droits, pendant un délai de deux ans. A l’expiration de ce délai, ce produit est acquis à l’Etat.

– Si la juridiction prononce la peine d’immobilisation du véhicule,

celui-ci n’est restitué au condamné qu’à l’issue de la durée de l’immobilisation fixée par la juridiction contre paiement des frais d’enlèvement et de garde en fourrière, qui sont à la charge de ce dernier.

En cas de relaxe,

le propriétaire dont le véhicule a été mis en fourrière sur autorisation du procureur de la République peut, selon des modalités précisées par arrêté du ministre de la justice, demander à l’Etat le remboursement, au titre des frais de justice, des frais d’enlèvement et de garde en fourrière qu’il a dû acquitter pour récupérer son véhicule.

Les conditions :

Plusieurs conditions s’imposent pour qu’une confiscation du véhicule soit préventivement ordonnée.

Premièrement :

toutes les infractions ne sont pas concernées. Seulement les plus graves. A titre d’exemple : l’alcool au volant, la conduite sous l’influence des stupéfiants, les grands excès de vitesse (supérieur à 50 km/h uniquement).

Deuxièmement : 

l’immobilisation et la mise en fourrière doivent être autorisées par le procureur de la République dans l’attente d’une confiscation judiciaire éventuelle.

Troisièmement :

que la confiscation soit provisoire ou définitive, seul le véhicule qui a servi à commettre l’infraction peut être confisqué.

Quatrièmement : 

la confiscation ne peut être prononcée que si le contrevenant est propriétaire du véhicule qui a été saisi.

Cette dernière condition est faite pour ne pas pénaliser le propriétaire du véhicule qui n’était pas le conducteur au moment où l’infraction a été constatée. Elle s’avère bien utile notamment pour les véhicules de société qui sont habituellement conduits par des salariés de l’entreprise ou lorsque la carte grise est au nom d’une personne qui ne conduit pas le véhicule… Dans ces hypothèses, la confiscation est impossible !

La confiscation obligatoire

Attention, la confiscation est aussi une peine complémentaire théoriquement obligatoire dans les cas les plus graves :

La récidive de grand excès de vitesse (> à 50 km/h)

La conduite sans permis,

La récidive de conduite sous l’influence de l’alcool ou en état d’ivresse manifeste,

La récidive de refus de se soumettre aux vérifications de l’état alcoolique (même article),

La récidive de conduite après usage de stupéfiants (article L.235-4).

Dans ces cas de figure qui sont loin d’être des cas d’école, le juge est censé motiver sa décision s’il décide de ne pas prononcer la confiscation du véhicule. Heureusement, la pratique judiciaire n’applique pas à la lettre ces textes qui peuvent avoir des conséquences désastreuses pour les justiciables. Mais il vaut mieux savoir que l’artillerie très lourde existe…

Les frais de fourrière

La confiscation prend la forme d’une mise en fourrière immédiate.

Mais si l’intéressé est ultérieurement relaxé par le Tribunal, les frais d’enlèvement et de garde qui auront dû être acquittés avant de récupérer le véhicule pourront être remboursés par l’Etat, à condition toutefois que la personne qui a bénéficié de la relaxe du Tribunal prouve qu’elle est le véritable propriétaire du véhicule.

La demande doit être faite au procureur de la République (ou auprès de l’Avocat Général en cas de décision rendue par la chambre des appels correctionnels) « dans un délai de six mois au plus tard à compter de la date à laquelle la décision de relaxe est devenue définitive, par déclaration au greffe contre récépissé ou par lettre recommandée avec accusé de réception ».

Il convient de joindre à la demande de remboursement la décision de relaxe et la justification du paiement des frais d’enlèvement et de garde en fourrière.

En cas de condamnation définitive, le véhicule confisqué est alors vendu et la somme obtenue est tenue pendant deux ans à la disposition d’éventuels créanciers gagistes avant d’être remise à l’Etat.

A noter que l’article R.325-27 du Code de la route dispose que les intéressés peuvent de manière générale et sans attendre qu’une juridiction ne soit saisie contester la décision de mise en fourrière auprès du procureur de la République du lieu de l’enlèvement du véhicule lorsqu’elle est consécutive à la commission d’une infraction. Auprès du préfet dans les autres cas. L’autorité compétente statue alors dans le délai de 5 jours ouvrables : soit la mesure est confirmée, soit la mainlevée est ordonnée si la décision de mise en fourrière est infondée.

 Jean-Charles Teissedre

Avocat au barreau de Montpellier

www.teissedre-avocats.com